Le devoir de mémoire


La nouvelle donne numérique

Le numérique est une manière d'appréhender le réel qui s'oppose à l'analogique. Il décrit les objets en les analysant par une succession d'échantillons très fins représentés par une suite de chiffres.

Il s'est imposé en peu de temps dans les différents domaines de la vie courante, parfois de manière très brutale : il est, par exemple, devenu quasiment impossible de continuer à faire des photos à l'ancienne, avec des matériels qui avaient fait leur preuve sur plus d'un siècle, et qui, quelque soit leur niveau de complexité ou de qualité, ne servent désormais plus à rien.
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(CC) BY-NC-SA — Rémi Kaupp

Le numérique est indissociable de l'informatique, dont il est la matière première, et qui lui donne en retour une puissance d'action dans certains domaines sans commune mesure avec ce qu'on aurait pu imaginer cinquante ans auparavant. Toujours dans le domaine de la photo, on se rappelle qu'une pellicule standard 24 x 36 ne comportait que 36 vues voire moins ! À mettre en perspective avec les capacités de stockage actuelles du moindre téléphone portable ou de la moindre carte mémoire. Et il en va de même des livres (une tablette peut embarquer une petite bibliothèque) ou de la vidéo (un film super-8 muet des années 70 ne durait pas plus de 3 mn !) et naturellement aussi du son (une cassette préenregistrée qu'on glissait dans le lecteur de la voiture ne comportait guère plus d'une vingtaine de titres).

Surtout, dans le domaine dont il est question ici (la mémoire), le numérique apporte deux caractéristiques qui changent radicalement la donne : ces données chiffrées (qui décrivent par exemple un morceau de musique) peuvent être recopiées à l'identique et sans aucune limite. À l'identique s'entend au sens le plus absolu de l'impossibilité de distinguer l'original de la copie, et sans limite signifie qu'une fois démultipliées et placées sur des supports variés et géographiquement distincts, elles deviennent pratiquement insensibles aux aléas de la vie et du temps. Là où une photo unique, qu'elle soit sur papier ou négatif, s'altère, voit ses couleurs ternir, et pourrait disparaître dans une inondation ou un incendie, les données numériques de cette même photo continueront à décrire les couleurs éternellement identiques à celles du jour de leur numérisation. Celle-ci fixe définitivement l'état du vieillissement d'un document. Naturellement le support de ces données est lui-même vulnérable, et leur format peut devenir inaccessible, mais cela fait l'objet de parades qui seront examinées plus loin : sauvegardes, archivages, standardisations et code ouvert.

Mémoire des gens, des objets et des événements

Les temps dits historiques sont caractérisés par la transmission des connaissances sur des supports permanents, par opposition aux civilisations préhistoriques où cette transmission était orale et par essence limitée et sujette à déformations.
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(CC) BY-NC-SA — José Manuel Benito

Les temps numériques vont permettre un saut équivalent en termes de quantité et de stabilité des informations transmises. Et pour des coûts financiers, énergétiques, ou en travail humain infiniment réduits.

Il en résulte des conséquences potentielles extraordinaires en termes de démocratisation du savoir, de diffusion des connaissances, et de pérennité des créations.

Et cela s'applique évidemment à la mémoire familiale, dans la possibilité de fixer, d'ordonner (classer) puis de transmettre une grande quantité de souvenirs, qui disparaissaient autrefois avec ceux qui les détenaient pour ce qui était de l'immatériel, ou atterrissaient anonymement chez un brocanteur ou un antiquaire si pas à la décharge publique pour ce qui était des objets… On parle naturellement ici également de traces de la vie des disparus, souvent réduits, pour les familles roturières, à des dates d'État civil, des inscriptions sur une pierre tombale, ou quelques photos vieillissantes et de plus en plus anonymes.

Mise en application dans un site internet

Un site internet comme celui-ci peut intervenir utilement, non seulement à destination des descendants concernés directement par leurs ancêtres, mais aussi, à titre d'exemple, à destination de ceux qui souhaiteraient poursuivre pour leur propre famille une démarche de même nature et à destination de qui un certain nombre de pages seront proposées, décrivant les outils et le savoir-faire que nous avons utilisés.

Rejoint par les structures les plus officielles

Cet article décrit la mise à disposition prochaine sur internet des courriers de dernières volontés de soldats anglais de la guerre de 14-18, désormais numérisés et protégés de l'oubli, et qui vont retrouver les très nombreuses initiatives de numérisation de documents anciens par les bibliothèques nationales, les instituts audiovisuels, les administrations (archives, état-civil…), et même des opérateurs privés prestigieux. Pour les structures françaises non commerciales, citons l'Atilf, Gallica, l'INA, FranceGenWeb, Archives de France, Geneanet, Cadastre.gouv.fr, auxquels il faut rattacher les différents services francophones de Wikipédia : GeoTemplate (cartographie), Wikimédia France

Cette démarche est vraiment « dans l'air du temps » !